
Produire du vin à 750 mètres d’altitude, sur des pentes volcaniques ? À Espaly-Saint-Marcel, près du Puy-en-Velay, ce pari fou est aujourd’hui une réalité. Le Clos du Paradis vient de lancer ses deux premières cuvées. Une révolution viticole au cœur de l’Auvergne (© Clos du Paradis).
Longtemps impensable, la culture de la vigne en Haute-Loire refait surface avec panache. « Le réchauffement climatique rend possible ce qui ne l’était pas », affirme Jade Hérail, directrice du Clos du Paradis. « Ces terres, trop froides autrefois, accueillent aujourd’hui la vigne et produisent des vins de qualité. » Depuis fin juin, les cuvées Paradis et Purgatoire font leur entrée sur la scène œnologique locale, et quelle entrée !
L’aventure démarre en 2000, dans les rêves de Jean-Pierre Laval, président de la Fondation Paradis, qui souhaitait redonner vie à ces terres en friche autour d’une maison de retraite du village. Il aura fallu vingt ans de patience, quelques millions d’euros et une bonne dose de foi pour que les premières vignes soient plantées en mai 2021. La première vendange, en octobre 2024, a donné naissance à 2 100 bouteilles. Autant dire une production rare et attendue.
Des vins d’altitude, ancrés dans leur époque
À 750 m, la vigne n’a rien d’évident. Mais le sol volcanique, riche en basalte et argile, allié à une exposition plein sud, donne au vin une minéralité saisissante. Exit les cépages traditionnels : ici, Solaris, Souvignier gris ou encore Johanniter prennent le relais. Des variétés hybrides, résistantes au gel, à la sécheresse et aux maladies, parfaitement taillées pour les défis climatiques.
« Ce sont des vins très racés, élégants, avec un floral fin. Ces cuvées sont surtout l’expression du terroir », analyse l’œnologue Nicolas Léger, qui a suivi cette première vendange de près. Le millésime 2024, bien que marqué par des pertes climatiques importantes, promet déjà beaucoup.
Deux cuvées pour un vin d’excellence
Deux cuvées sont d’ores et déjà disponibles auprès de cavistes régionaux. Le Clos du Paradis, élevée en fût, séduit par son nez exotique et floral, sa bouche généreuse et sa finale saline. Un vin gastronomique vendu 55 €, idéal avec un carpaccio de Saint-Jacques ou des sardines à la plancha. Et le Purgatoire, assemblage avec du Chardonnay, plus tendue, plus iodée, s’accorde merveilleusement avec une truite au fenouil ou une Pavlova au pamplemousse.
Une gamme encore confidentielle, mais l’objectif est clair : « On veut atteindre les 12 000 bouteilles d’ici quatre ans », confie Jade Hérail. La Haute-Loire vit-elle sa renaissance viticole ? À en croire cette première cuvée, le vin de demain pourrait bien venir du Paradis… au cœur de l’Auvergne.
Geneviève Colonna d’Istria